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Qu’est-ce que la biologie synthétique ?

La biologie synthétique a pour but de concevoir et développer en laboratoire des systèmes biologiques tels qu’ils n’existent pas dans la nature ou à reconstruire, en les modifiant, des systèmes existants. A ces fins, elle vise à fabriquer des composants standardisés capables de s’assembler en systèmes aptes à remplir une fonction donnée. La biologie synthétique constitue un domaine des sciences de la vie qui recourt aux compétences de l’ingénierie pour construire à partir de matériaux biologiques, de manière ciblée et contrôlée, des systèmes générant des produits utiles à la société. L'éventail des applications potentielles de la biologie synthétique est large et comprend, par exemple, la production de médicaments à partir de cultures cellulaires, le développement de matériaux de construction novateurs ou la production de carburants par des algues. De bonne heure déjà, la biologie synthétique a cependant soulevé des questions de sécurité biologique portant aussi bien sur la protection contre des dommages non intentionnels que sur la prévention d’abus délibérés. La question de savoir si les réglementations et mesures de sécurité actuelles sont suffisantes ou s’il faut développer de nouvelles méthodes d’analyse des risques et de gestion des risques est débattue au niveau international.

Klebsiella pneumonae colony growing on an agar plate
Image : Centers for Disease Control and Prevention

Le terme de « biologie synthétique » recouvre plusieurs approches qui visent à créer de manière systématique et contrôlée des systèmes biologiques nouveaux. La biologie synthétique utilise en les combinant les connaissances issues de différents domaines des sciences de la vie, de l’informatique et de l’ingénierie.

Composants standardisés et cellules synthétiques

La biologie synthétique regroupe des projets de recherche et développement qui recourent à des approches différentes, telles que:

  • Bioingénierie
    Cette stratégie a pour but de faire de la biologie une discipline de l’ingénierie, au sein de laquelle on travaille avec des éléments standardisés que l’on peut assembler selon un schéma hiérarchique. Ces composants sont des éléments génétiques, appelés biobriques, conçus selon un modèle de base qui permet de les combiner à volonté.
  • Génomique synthétique
    Cette approche vise à synthétiser un génome entier, c’est-à-dire produit artificiellement au laboratoire. Un des buts est de réduire lesgénomes en éliminant les séquences inutiles. Ces génomes simplifiés devraient se prêter plus facilement à l’adjonction de gènes ou de séquences d’ADN spécifiques.
  • Xénobiologie
    Les scientifiques qui utilisent l’approche de la xénobiologie se sont fixé pour but de produire des organismes dotés d’un système génétique autre que celui des êtres vivant dans la nature. Certain-e-s d’entre eux tentent de remplacer l’ADN et l’ARN par de nouvelles formes d’acides nucléiques (on parle de XNA pour « xeno nucleic acid »), d’autres s’en tiennent aux acides nucléiques conventionnels, mais entendent concevoir un nouveau code génétique.
  • Protocellules
    Les scientifiques qui suivent cette piste veulent construire des cellules vivantes à partir de molécules (telles que ADN et lipides, par exemple).Ce seraient des cellules simplifiées. On espère ainsi acquérir des connaissances quant à savoir comment la vie s’est développée sur la terre à partir de matière non vivante.

La biologie synthétique s’inscrit dans la continuité du génie génétique. Bien qu’elle s’en rapproche dans certains cas, elle s’en distingue néanmoins en ce qu’elle va plus loin et joue à un niveau supérieur de complexité. Grâce à l’usage d’une plate-forme technologique qui inclut les acquis du génie génétique et un système informatique extrêmement performant, elle est capable de concevoir et élaborer des composants biologiques standards, les biobriques. Elle peut les assembler en systèmes fonctionnels non-existants dans la nature ou les utiliser pour développer de nouvelles voies métaboliquesdans des organismes existants. La standardisation de composants biologiques comparables à des pièces Lego biologiques figurant dans un catalogue et pouvant être commandés isolément est une approche propre à la biologie synthétique.

Objectifs et applications possibles

D’une part la biologie synthétique veut créer les conditions requises pour fabriquer de manière efficace des produits répondant aux besoins de la société, comme de nouvelles substances thérapeutiques ou des carburants par exemple. D’autre part, elle entend contribuer à l’acquisition d’une meilleure connaissance des processus vitaux fondamentaux. La biologie synthétique a le potentiel de modifier plusieurs secteurs de l’économie et domaines vitaux tels que:

  • Médecine
    Le potentiel de la biologie synthétique est considérable: production cellulaire de médicaments, de vaccins et de composants tissulaires; développement deméthodes de diagnostic raffinées; élaboration debactéries spécifiques favorisant la digestion ou thérapie génique sur mesure.
  • Énergie
    La biologie synthétique vise à offrir des alternatives aux combustibles fossiles en créant de nouvelles sources d’énergie. Des projets ont pour but de produire de l’éthanol ou de l’hydrogène à partir d’algues ou de bactéries.

  • Molécules précieuses
    Outre des médicaments, la biologie synthétique devrait permettre la fabrication de nombreuses autres molécules particulièrement utiles, p.ex. pour des cosmétiques ou des aliments.

  • Matériaux novateurs
    La biologie synthétique pourrait contribuer au développement de nouveaux matériaux, p.ex. pour des vêtements de protection ou des enveloppes de bâtiments. Ces matériaux pourraient être capables de détecter et de réagir aux changements environnementaux.

  • Senseurs biologiques et bioremédiation
    Des microorganismes façonnés « sur mesure » devraient permettre de détecter et éliminer des pollutions environnementales.

Risques et mesures de sécurité

Très tôt déjà, la biologie synthétique a soulevé des questions de sécurité biologique portant aussi bien sur la protection contre des dommages non intentionnels (biosécurité) que sur la prévention d’ abus délibérés (biosûreté). La biologie synthétique permet d’aller plus loin que le génie génétique dans la transformation de systèmes biologiques et il peut en résulter des organismes qui n’ont que peu à voir avec des formes de vie connues.

Il est difficile de prévoir comment de nouvelles formes de vie se comporteraient dans le corps humain ou dans l’environnement, car il manque une base de comparaison. C’est pourquoi, présentement, le débat sur les risques de la biologie synthétique se concentre sur la question de savoir si les réglementations et mesures de sécurité actuellessont suffisantes ou s’il faut développer de nouvelles méthodes d’analyse des risques et de gestion des risques. Au niveau international, cette question est traitée notamment par les Etats membres de la Convention sur la diversité biologique.

A cet égard, il convient de relever que la biologie synthétique peut également accroître la sécurité. Par exemple, la connaissance détaillée des séquences qui peuvent être sélectionnées de manière ciblée dans une grande base de données devrait permettre de limiter la survenance éventuelle d’effets imprévus.
Les systémes xénobiologiques offriraient une protection également : en effet, les éléments génétiques qu’ils pourraient transmettre à des organismes naturels par le biais de virus ou d’autres vecteurs ne seraient pas fonctionnels.
De façon générale, retenons que la biologie synthétique comporte un large spectre d‘approches et d’applications potentielles. Pour cette raison, il importe que les dispositions légales soient adaptées aux risques des différents types d’activités.

Octobre 2020
Révision: Alexander Schanne, President Synthetic Biology UZH, iGEM 2019 alumni (Link)

Informations additionnelles

  • Portal on Synthetic Biology of the Convention for Biological Diversity (CBD) Lien
  • Webportal Synthetische Biologie Max-Planck-Gesellschaft Lien
  • Cours en ligne «Synthetic Biology» von EMBO/EMBL Lien
  • Synthetische Biologie - eine neue Stufe der Bio- und Gentechnologie (2015) Bericht des Deutschen Büros für Technologiefolgen-Abschätzung beim Bundestag (TAB) Lien
  • Deplazes A (2009) Piecing together a puzzle. An exposition of synthetic biology. EMBO reports 10: 428-432. Lien
  • El Karoui et al. (2019) Future trends in synthetic biology - a report. Front Bioeng Biotechnol. 7: 175. Lien
  • Académies suisses des sciences (2017) Recherche biologique, potentiel d’abus et biosûreté. Swiss Academies Report 12 (3). Lien
  • Bioingénierie: Comme dans un ordinateur, en bioingénierie, les composants biologiques isolés doivent être assemblés dans une structure hiérarchique.
  • Xénobiologie: Quelques exemples de XNAs – nouvelles formes d’acides nucléiques constituant des alternatives à l’ADN. Le désoxyribose est souvent remplacé par un autre type de sucre.
  • Protocellules: Des cellules vivantes pourraient un jour être produites en laboratoire à partir de matériel non vivant, tel que ADN et lipides par exemple.
  • Application médicale: Des cellules transformées à l’aide des méthodes de biologie synthétique – à l’avenir un traitement possible du diabète.
  • Senseurs biologiques: Détection d’arsenic dans l’eau potable.
  • Bioingénierie: Comme dans un ordinateur, en bioingénierie, les composants biologiques isolés doivent être assemblés dans une structure hiérarchique.Image : Andrianantoandro et al, 2006, Mol Syst Biol.2 :2006.00281/5
  • Xénobiologie: Quelques exemples de XNAs – nouvelles formes d’acides nucléiques constituant des alternatives à l’ADN. Le désoxyribose est souvent remplacé par un autre type de sucre.Image : Franziska Oeschger, Forum Genforschung2/5
  • Protocellules: Des cellules vivantes pourraient un jour être produites en laboratoire à partir de matériel non vivant, tel que ADN et lipides par exemple.Image : F. Oeschger, Forum Genforschung3/5
  • Application médicale: Des cellules transformées à l’aide des méthodes de biologie synthétique – à l’avenir un traitement possible du diabète.Image : Franziska Oeschger, Forum Genforschung4/5
  • Senseurs biologiques: Détection d’arsenic dans l’eau potable.5/5

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