Ce portail web explique comment fonctionne l'édition du génome dans la sélection végétale. Il présente des plantes utiles dont le génome a été édité, issues de la recherche en matière de sélection et qui pourraient intéresser la Suisse, et répond aux questions fréquemment posées sur le sujet.

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Résistance au feu bactérien chez la pomme

Pomme avec et sans résistance au feu bactérien
Image : Natascha Jankovski / SCNAT (CC BY-NC-ND 3.0)

L’essentiel en bref

  • Le feu bactérien constitue l’un des plus grands dangers pour l’arboriculture suisse.
  • Il n’existe pratiquement aucun remède efficace contre l’agent pathogène bactérien.
  • Le processus de sélection de variétés robustes est complexe et, chez les variétés établies, il s’accompagne de perte de certaines de leurs propriétés.
  • La technologie CRISPR/Cas a déjà permis de rendre des variétés de pommes établies plus résistantes au feu bactérien.

Le défi

La bactérie à l’origine du feu bactérien (Erwinia amylovora), introduite accidentellement des États-Unis, se propage en Suisse depuis 30 ans et a causé d’importants dégâts dans les vergers. Les arbres fruitiers à haute tige (cognassiers, poiriers et pommiers), qui ont une grande valeur écologique et culturelle, sont particulièrement menacés. À la suite de l’infection, les fleurs et les feuilles des bouquets floraux flétrissent et noircissent. Les jeunes arbres meurent en quelques semaines, les arbres plus âgées au bout de quelques années. La bactérie se développe au printemps si certaines conditions d’humidité et de température sont réunies. En été, elle se propage rapidement par la pluie, le vent, les oiseaux, les insectes et l’homme. La lutte contre cette maladie s’avère particulièrement difficile.

La stratégie actuelle

En Suisse, on a longtemps essayé d’éliminer l’agent pathogène par la mise en quarantaine et l’abattage à grande échelle des arbres infectés. Selon des estimations, plus de 300’000 pommiers et poiriers ont été arrachés entre 2000 et 2014 pour lutter contre le feu bactérien, dont environ 100’000 arbres fruitiers à haute tige (réf). Cette stratégie a été abandonnée en 2020. Depuis lors, la gestion du feu bactérien repose sur le choix de variétés robustes ainsi que sur la surveillance et l’assainissement des vergers, sur l’observation des mesures d’hygiène et l’utilisation de produits phytosanitaires. En tant que produits phytosanitaires, on utilise des préparations à base de levure, de l’argile acétique et du sulfate d’aluminium et de potassium. Ces produits permettent de réduire l’infestation de l’ordre de 50 à 70 pour cent (réf). L’utilisation d’antibiotiques, qui a été autorisée dans notre pays pendant quelques années comme dernier ressort contre le feu bactérien, n’est plus autorisée depuis 2016 (réf).

La plupart des variétés de pommes et de poires disponibles dans le commerce (par ex. ‘Braeburn’, ‘Gala’ et ‘Golden Delicious’ ou ‘Conference’ et ‘Williams Christ’) sont très sensibles au feu bactérien (réf). Il existe plusieurs variétés anciennes présentant une résistance accrue à la maladie, ainsi que quelques variétés plus récentes (par ex. ‘Ladina’ et ‘Rewena’), qui sont toutefois peu répandues à ce jour. Ces variétés sont certes également susceptibles à être infectées, mais après l’infection des fleurs ou des pousses, la bactérie se propage moins rapidement dans la plante hôte que dans les variétés plus vulnérables.

Le potentiel des nouvelles méthodes de sélection

La sélection de nouvelles variétés de fruits à pépins est un long processus. Suite à un croisement, les fruits obtenus à partir de semis de pommiers ne peuvent être récoltés et décrits pour la première fois qu’après plusieurs années. De plus, plusieurs croisements sont généralement nécessaires pour combiner les propriétés de résistance avec une qualité de fruit optimale. C’est pourquoi il faut patienter jusqu’à vingt ans avant de disposer d’une nouvelle variété résistante. Ensuite, il faut compter encore cinq ans pour l'essai variétal et la mise sur le marché.

L’édition génomique a le potentiel de rendre les variétés de pommes déjà commercialisées plus résistantes au feu bactérien, et ce beaucoup plus rapidement qu’avec les méthodes de sélection conventionnelles. En effet, l’édition génomique ne nécessite pas de rétrocroisements pour éliminer les caractéristiques non souhaitables. De plus, il est possible de combiner plusieurs mécanismes de résistance au sein d’une même variété. Cela réduit le risque que la bactérie réussisse à surmonter la résistance de la plante en modifiant ses propres gènes.

Stade de développement

En utilisant la technologie CRISPR/Cas, des chercheurs et chercheuses ont réussi à désactiver un gène des variétés de pommes ‘Gala’ et ‘Golden Delicious’, qui les rend plus sensible au feu bactérien. Le système CRISPR/Cas a été introduit temporairement dans leur génome puis éliminé. Après cette introduction, quelques fragments non fonctionnels de l’ADN codant pour le système CRISPR/Cas sont restés dans le génome. Par ailleurs, aucune modification involontaire du patrimoine génétique n’a été constatée. Dans les conditions de l’essai, après une infection par le feu bactérien, les plantes obtenues par édition génomique présentaient environ 50 % moins de symptômes (réf).

Perspectives

Si la stratégie visant à améliorer la résistance au feu bactérien présentée ci-dessus, s’avère efficace sur le terrain, elle pourra être appliquée à d’autres variétés sensibles de pommes. Avec des systèmes CRISPR/Cas introduits temporairement, on pourrait davantage accélérer la sélection et empêcher que des fragments de l’outil moléculaire ne restent dans le génome des variétés de pomme (réf). Pour améliorer encore la résistance au feu bactérien, on pourrait éventuellement combiner plusieurs mécanismes de résistance à l’aide de CRISPR/Cas. Une combinaison de plusieurs mécanismes de résistance, associée à une bonne gestion de la résistance, s’impose également parce que les bactéries du feu bactérien sont capables de s’adapter assez rapidement sur le plan génétique.